Italie: le nom de la mère

La tradition qui attribue à tous les membres de la famille le nom du père constitue une discrimination envers les femmes et procède d’une conception patriarcale de la famille qui n’est pas compatible avec le principe d’égalité entre homme et femme, a jugé la Cour européenne des droits de l’homme.

L’affaire concerne un couple d’italiens résidant à Milan à l’occasion de la naissance de leur premier enfant, Maddalena, qu’ils souhaitaient inscrire au registre de l’état civil sous le nom de la mère, Cusan, au lieu de celui du père, Fazzo.

Faisant valoir qu’aucune disposition du droit italien ne s’opposait à ce que leur fille porte le nom de famille de la mère, le couple Fazzo-Cusan a bataillé devant les juridictions internes italiennes jusqu’à la cour constitutionnelle qui, bien qu’estimant la question irrecevable et relevant du législateur, considéra que le système en vigueur dérivait d’une « conception patriarcale de la famille et des pouvoirs du mari, qui avait ses racines dans le droit romain et n’était plus compatible avec le principe constitutionnel de l’égalité entre homme et femme ».

C’est ainsi que les époux Fazzo-Cusan soumirent, le 29 mai 2006, la question à la Cour de Strasbourg sur le fondement des articles 8 relatif au droit au respect de la vie privée et familiale et 14 relatif à l’interdiction de la discrimination. Comme en France, la législation italienne a entre-temps un peu évolué et le 14 décembre 2012, ils ont obtenu du préfet de Milan l’autorisation de compléter le nom de leurs enfants légitimes par l’adjonction du nom de la mère mais il s’agit d’un simple ajout du nom de la mère à celui du père qui ne les satisfait pas complètement.

la Cour européenne des droits de l’homme
La Cour européenne des droits de l’homme


Il y a discrimination, rappelle la Cour européenne des droits de l’homme(1), dès lors que, sans justification objective et raisonnable, des personnes se trouvant dans des situations comparables sont traitées de manière différente et, au cas particulier, le père et la mère de l’enfant sont traités de manière différente puisqu’à la différence du père — et malgré l’accord des époux —, la mère n’a pas pu obtenir l’attribution de son nom de famille à son nouveau-né.

Rappelant sa jurisprudence relative à l’importance d’une progression vers l’égalité des sexes et de l’élimination de toute discrimination fondée sur le sexe dans le choix du nom de famille, la Cour considère que « la tradition » qui attribue à tous les membres de la famille le nom du père ne peut justifier « une discrimination envers les femmes ».

Pour la Cour, si la règle voulant que le patronyme soit dévolu aux enfants légitimes est nécessaire en pratique et n’est pas forcément contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, c’est « l’impossibilité d’y déroger qui est excessivement rigide et discriminatoire envers les femmes ».

8 janvier 2014 - Article de Lextimes.fr

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